MOUVEMENT REPUBLICAIN ET CITOYEN
Lettre électronique de GEORGES SARRE

Assurance Maladie, attention danger !
10 juin 2004

Philippe DOUSTE-BLAZY est un homme très habile. En annonçant qu'il allait aider fiscalement les personnes de faibles revenus pour leur permettre de s'offrir une mutuelle, il a donné le sentiment d'amender son projet de " réforme " de l'Assurance Maladie dans le sens de la justice sociale.

Il n'en est rien. Cette mesure, quelles que soient ses conséquences positives à court terme pour les bénéficiaires, va dans le même sens que l'ensemble des régressions contenues dans le projet DOUSTE-BLAZY : la privatisation rampante de l'Assurance Maladie. Qui ne voit en effet que l'on s'achemine vers une assurance maladie obligatoire minimaliste, étant à la sécurité sociale ce que les services d'intérêt général européens sont aux services publics ? Avec la C.M.U. (qui fut en elle-même une bonne mesure), l'aide d'Etat à l'adhésion mutualiste, le déremboursement de certains soins, le déplafonnement annoncé des honoraires des spécialistes, l'Assurance Maladie n'aura bientôt plus en charge qu'un " panier de soins ", prétendus essentiels.

Pour le reste, seuls les plus pauvres seront couverts par la C.M.U., et les autres devront payer, en fonction de leurs revenus, des mutuelles ou des assurances complémentaires. Dans cette affaire, la charité, une fois de plus, se révèle être la forme la plus hypocrite de l'injustice et de la régression sociale.

Et pourtant, il y aurait des politiques publiques à mener pour sauver la Sécurité Sociale, et notamment l'Assurance Maladie, conquise à la Libération.

D'abord, il faut être lucide sur le " trou " de la Sécu. Pendant l'embellie économique mondiale des années 1997-2001, l'emploi en France a progressé, et avec lui, les recettes de l'Assurance Maladie. Ainsi, la branche Maladie de la Sécurité Sociale était-elle alors à l'équilibre. La question du chômage est donc la première priorité pour faire revenir à l'équilibre les comptes de la Sécurité Sociale. Il faut aussi pointer les dégrèvements de charges patronales accordées aux entreprises, et qui diminuent considérablement les recettes de la Sécurité Sociale.

Cependant, il est nécessaire de procéder à certaines réformes, non seulement pour mieux dépenser, mais surtout pour mieux soigner.

Ainsi en va-t-il du dossier médical par exemple, qui doit permettre non pas de contrôler les consultations à répétition (pratique marginale), mais plutôt d'éviter les explorations redondantes.

Il faut en outre renforcer les habitudes de prescription et d'utilisation des médicaments génériques. On peut aussi redéfinir la politique de prix des médicaments, et imaginer un système de rémunération forte de l'innovation pendant une durée limitée, puis d'abaissement des prix à l'issue de la période de rentabilisation de l'innovation. Les laboratoires ne doivent plus être seuls à définir leurs exigences de prix sous couvert de recherche et développement.

On peut aussi accepter une part de tarification à l'acte dans les hôpitaux, pour épouser les variations d'activité et rationaliser les dépenses. A condition qu'une enveloppe globale conséquente continue de pallier les dépenses de Service Public qui ne sont pas toujours corollaires du niveau d'activité.

Il faut enfin, et surtout, une véritable politique publique de prévention et d'éducation sanitaire.

Mais toutes ces réformes, paradoxalement, nécessitent de l'argent supplémentaire : il n'est pas imaginable que praticiens, patients, pouvoirs publics, acceptent de remettre en question certaines pratiques s'ils ne peuvent en mesurer vite les effets médicaux positifs. La seule perspective comptable ne motive personne. L'amélioration de la qualité des soins peut motiver les efforts de tous. Elle n'est pas possible à moyens constants.

Oui, la santé coûte cher. Mais personne ne peut croire que la France, quatrième puissance économique mondiale, n'a pas aujourd'hui les moyens d'un système juste et efficace.

Georges Sarre est maire du XIe arrondissement de Paris et porte-parole du MRC.

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