MOUVEMENT REPUBLICAIN ET CITOYEN
Lettre électronique de GEORGES SARRE

" L'Europe se met à nu au Mexique…"
02 juin 2004

A posteriori, le choix de ne pas participer aux élections européennes - choix en partie dicté par des considérations financières -s'avère avoir été bon. L'actuelle non-campagne pour les élections européennes est en train d'atteindre des sommets de médiocrité. Qu'aura t'on appris ? En gros, qu'un leader d'extrême droite est fâché avec certains de ses lieutenants et que l'éternel Dany Cohn-Bendit aime Zidane. Pendant ce temps, l'Europe - la vraie, la seule - se " fait ".

Les grands événements qui révèlent la nature de l'Europe, ces éléments nécessaires au débat, sont passés sous silence. L'on sait déjà que la " Constitution " sera adoptée après les élections européennes. Rideau sur la " Constitution ". Circulez, il n'y a rien à voir. Mais l'Europe accomplit d'autres travaux éminemment conséquents pour les peuples de ce continent et d'ailleurs. Pour accomplir sa besogne, l'Europe - entendez les institutions bruxelloises et leurs correspondants gouvernementaux - s'est transportée à Guadalajara, au Mexique, pour un sommet Amérique latine-Union Européenne.

C'est en effet là, en Amérique centrale, que l'Europe, la vraie, révèle son vrai visage. Là que Pascal Lamy, commissaire européen et membre du PS français, se fait le promoteur d'une accélération et d'une amplification de la libéralisation des échanges entre l'Union européenne, d'une part, et le Mercosur, d'autre part, en attendant toute l'Amérique latine. L'accès des marchés publics, des services et les investissements devraient donc être libéralisés, si les négociations suivent la pente indiquée par le docteur Lamy, grand prescripteur de remèdes néo-libéraux… La surprise a été grande en Amérique latine, lors des premières rencontres avec les émissaires de la Commission européenne, ces derniers ayant fixé un cadre de négociations extrêmement strict. Quelques discussions avec des officiels latino-américains ont vite permis de comprendre que l'équipe de Monsieur Lamy, mandatée par les Vingt-cinq, va plus loin que les envoyés du Département du Commerce de Washington. Les émissaires de Monsieur Bush sont moins dogmatiques que ceux des gouvernements européens !

Et les élections européennes en France permettent de saisir l'étonnant décalage entre le faux débat dont nous sommes les spectateurs affligés et la réalité de ce qu'est l'Europe. Entre la réclame " Faire l'Europe " pour " protéger nos emplois ", pour " garantir la paix ", " faire l'Europe sociale " pour résister à la mondialisation, ou " faire l'Europe puissance " pour peser face aux Etats-Unis… Que n'a-t-on entendu depuis des années sur la construction européenne ! Pourtant les faits sont là ! L'Europe n'est pas - c'est une évidence - un rempart contre la mondialisation libérale. Elle n'en est même plus un relais. Elle en est un moteur. C'est volontairement, depuis le traité de Rome, depuis 1957, que les gouvernants européens et les institutions qu'ils ont fondées se sont faits les promoteurs du libre-échange. Là encore, l'accord de libre-échange avec le Mercosur nous est présenté comme l'occasion de développer le multilatéralisme, alors qu'il ne s'agit que de d'accélérer ce qui mine des économies depuis trop longtemps.

L'Europe est construite par le libéralisme et pour le libéralisme. Ce qu'il y a de proprement scandaleux dans la propagande européiste, c'est l'affirmation constante de la fausse idée selon laquelle l'Europe est construite pour " humaniser " la mondialisation alors qu'elle en est une actrice de premier plan. Le sommet de Guadalajara aurait dû faire l'objet d'un débat entre les candidats au Parlement européen ; il n'en est rien, preuve supplémentaire que ce parlement ne sera jamais rien de plus qu'une caution démocratique. En lieu et place d'un tel débat, nous n'aurons eu que vide, langue de vent et effets de scènes…

La grande explication, de toute façon, va bientôt venir - et l'occasion se présentera avec le référendum sur la " Constitution " européenne. Il faut donc se battre pour l'obtenir et préparer la future campagne du " Non " !

Chacun alors se déterminera en conscience pour choisir la société dans laquelle nous voulons vivre, dans un pays où c'est le peuple qui décide après des débats allant au fond des choses.

Georges Sarre est maire du XIe arrondissement de Paris et porte-parole du MRC.

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