La lettre électronique de Georges SARRE

Corse : c'est NON !
07 juillet 2003

Les électeurs des deux départements corses ont donc dit "non" !

Malgré une débauche de moyens, huit visites du Ministre de l'Intérieur, le soutien actif du Président de la République et toute l'inventivité du Premier Communiquant de Matignon, les citoyens habitant les départements corses ont répondu "non" à ce projet censé ouvrir la voie à une "République décentralisée", qui n'en aurait plus eu que le nom. Il s'agit à maints égards d'une sanction cinglante contre le gouvernement.

Sanction donc contre les projets de régionalisation du gouvernement et particulièrement du Premier Ministre, ce vote marquera la fin des ambitions de la "nouvelle gouvernance" raffarinienne. Sanction également contre une manière de faire de la politique, le vote de dimanche marque bien le refus des électeurs de Corse en particulier mais très certainement de la France dans son ensemble de donner un blanc seing à des opérations électorales à grand spectacle se terminant debout sur des salons de jardin dans des arrière-salles d'attentes d'aéroports. Sanction probable contre un gouvernement et une classe politique locale ayant limogé un préfet comme on renvoie un directeur de campagne. Sanction enfin contre un gouvernement soupçonné d'avoir choisi la date et l'heure d'une arrestation attendue depuis quatre ans.

Le processus Raffarin-Sarkozy-Talamoni, prolongement du processus de Matignon, est donc rejeté par les électeurs. Il s'agit sans doute du dernier acte de la politique d'abandon qu'ont suivi de trop nombreux gouvernements depuis longtemps en Corse. Les électeurs consultés ce dimanche ont clairement affirmé leur refus d'un projet qui aurait placé la Corse dans l'antichambre de l'indépendance.

Il s'agit d'une victoire pour tous ceux qui, comme Jean-Pierre Chevènement, Emile Zuccarelli et Nicolas Alfonsi, ont choisi depuis longtemps de refuser d'abandonner l'idéal égalitaire de notre République.

Le gouvernement avait fait de la décentralisation un axe central de sa politique. Assumant une hostilité désormais non refoulée au principe d'égalité entre les hommes et les territoires, la droite projetait de faire de la France un vaste ensemble d'entités politiques à géométrie variable qui aurait vu des départements fusionner, d'autres se créer, des régions apparaître et d'autres éclater. Bien entendu l'unique objet d'une telle réforme était de faire entrer en concurrence les collectivités locales d'accorder d'autant plus de pouvoirs à des exécutifs locaux en compétition les uns avec les autres.

D'inspiration libérale et anti-égalitaire, cette réforme se voulait un prolongement de la logique de l'Europe communautaire. Les électeurs des départements corses ont compris une donnée essentielle du projet soumis à référendum ce dimanche : il s'agissait d'une affaire de gouvernants et d'élites auto-proclamées, de notables locaux et d'idéologues séparatistes. Sur le fond comme sur la forme, les électeurs ont été traités non comme des citoyens mais comme une caisse enregistreuse de la nouvelle répartition des pouvoirs que planifiait le gouvernement. Cette victoire du "non" c'est un Austerlitz du citoyen !

Le gouvernement et la classe politique française pourront longtemps se souvenir de ce vote du 6 juillet. Il restera comme le symbole du rejet de la régionalisation Raffarin et d'une façon de faire de la politique. Il tend également à prouver que les futures projets soumis à référendum aux Français pourront être librement rejetés même s'ils sont soutenus par l'ensemble des grands partis dits "de gouvernement ".

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